
Réchauffement climatique : l’IA, problème ou solution ?
Pour Tim Cook, le patron d’Apple, l’IA Générative est « une énorme boite à outils pour toutes les entreprises qui souhaitent devenir neutres en carbone ou réduire leurs émissions de manière substantielle ». En effet, l’IA transforme de nombreux secteurs comme la santé, la finance ou encore la logistique et les transports. Mais l’IA suscite également de grandes attentes pour sauver notre planète des effets néfastes du réchauffement climatique.
Pourtant, les grands modèles de langages comme ChatGPT (OpenAI), Gemini (Google) et Copilot (Microsoft) sont énergivores. Ils ont besoin d’une grande quantité d’électricité pour fonctionner. Une électricité qui est encore trop peu renouvelable, ce qui implique donc plus d’émissions de gaz à effet de serre. De plus, sont nécessaires une quantité d’eau colossale pour refroidir les datacenters et de nombreux matériaux rares pour les fabriquer.
En janvier 2025, l’entreprise chinoise DeepSeek a mis au point un modèle proposant des performances équivalentes à celles des modèles existants, tout en nécessitant beaucoup moins de puissance de calcul et de données, ce qui entraîne une consommation énergétique réduite.
Des innovations pour lutter contre le réchauffement climatique
L’IA peut être une alliée de taille pour lutter contre le réchauffement climatique. Ainsi, l’intelligence artificielle est mise à contribution pour surveiller et diminuer les émissions de CO₂ dans divers secteurs. Par exemple, des modèles d’apprentissage automatique sont utilisés pour optimiser la consommation d’énergie dans les bâtiments et les transports.
Voici donc quelques exemples d’entreprises qui utilisent l’IA pour améliorer la gestion des ressources énergétiques et protéger la biodiversité :
- Google Earth Engine utilise une IA pour cartographier les écosystèmes et surveiller ses changements tels que l’expansion urbaine et la déforestation.
- Ocean Mind se sert d’une IA pour surveiller les activités de pêche et identifier les pratiques non durables. Cela permet notamment une gestion optimale des ressources maritimes.
- PreviZo est un projet IA régional du Centre Val de Loire qui a pour objectif d’anticiper les périodes de stress hydrique pour mieux préserver nos ressources en eau.
Y a-t-il des initiatives dans le secteur du luxe ?
Les marques de luxe adoptent des solutions d’IA pour réduire leur impact sur l’environnement. En voici quelques exemples :
- Kering a réussi à réduire ses surstocks de 30 % grâce à des systèmes intelligents qui ajustent automatiquement les niveaux d’approvisionnement. Cette approche permet de minimiser le gaspillage et d’optimiser l’utilisation des ressources.
- LVMH utilise désormais des jumeaux numériques dans ses centres de distribution. Ces modèles virtuels optimisent les flux logistiques en temps réel, anticipent les pics d’activité et ajustent les ressources nécessaires.
- Dans le cadre de son programme « L’Oréal for the Future« , L’Oréal s’engage à intégrer une majorité de matières premières durables dans ses produits d’ici 2030. En exploitant les données de ses chercheurs sur les matériaux biosourcés et l’économie circulaire, l’entreprise prévoit de développer un modèle d’IA capable de reformuler les cosmétiques existants. Ce modèle visera à rendre les produits plus durables tout en préservant leurs propriétés. L’objectif est de proposer des cosmétiques moins chimiques et donc moins nocifs pour l’environnement.
Ainsi, les initiatives sont nombreuses dans le luxe et dans d’autres secteurs pour utiliser l’IA en faveur de l’environnement. Elles sont lancées aussi bien par des grandes que des petites structures, et par tous types d’organisations. Par ailleurs, il faut noter que de nombreuses entreprises de la Tech se sont engagées à atteindre la neutralité carbone d’ici 2030. C’est notamment le cas de Microsoft qui promet d’utiliser l’IA pour réduire ses émissions.
Cependant nous allons constater le point suivant : l’IA semble pour le moment consommer beaucoup plus d’énergie qu’elle n’en fait économiser.
L’impact négatif de l’IA sur la planète et son environnement
Microsoft s’est engagé à atteindre la neutralité carbone d’ici 2030, mais a pourtant augmenté en 2023 de 30% ses émissions de CO2 par rapport à 2020 et ce en grande partie à cause de l’IA. Ainsi, le bilan carbone de Microsoft est le même que celui d’Haïti, ce qui représente environ 15 millions de tonnes de dioxyde de carbone.
Alors pourquoi les émissions en CO2 ont augmenté avec l’arrivée de l’IA ?
L’IA Générative utilise des LLM (large language model). Ils sont fondés sur des milliards de paramètres et consomment une très grande quantité d’énergie. L’Agence Internationale de l’Energie estime que les Data Centers représentent déjà 4% de la consommation d’électricité globale. La consommation totale des data centers pourrait être multipliée par 10 d’ici 2026, soit l’équivalent de celle du Japon !
Les principales causes de cette hausse sont :
- L’entrainement des modèles : Pour créer un modèle d’IA générative, il faut entrainer l’algorithme sur d’immenses quantités de données. Il est donc nécessaire de construire des infrastructures informatiques extrêmement puissantes qui fonctionnent avec un très grand nombre de GPU (Graphics processing unit). En janvier 2024, Mark Zuckerberg CEO de Meta, souhaitait acquérir 350 000 GPU H100 de Nvidia.
- Les data centers : Les LLM nécessitent des data centers toujours plus grands pour stocker et traiter les gigantesques quantités de données. Au-delà de la quantité d’électricité nécessaire pour fonctionner, les data centers ont besoin d’énormes quantités d’eau pour être refroidis et maintenus à une température entre 18 et 27 degrés. Ainsi, selon une étude américaine de 2023, une simple requête générée par GPT-4 engloutie l’équivalent d’une petite bouteille d’eau et consomme l’énergie servant à alimenter 14 ampoules LED pendant une heure. Un chiffre surement déjà obsolète depuis l’apparition de modèles bien plus puissants depuis 2023.
- Le fonctionnement des IA : il s’agit de la phase d’inférence, c’est à dire lorsqu’un utilisateur pose une question au modèle LLM. Les processeurs qui font tourner les IA sont également des GPU et peuvent consommer 5 à 6 fois plus que la phase d’entrainement.
Pour donner quelques illustrations concrètes, une requête sur un LLM comme ChatGPT consomme environ 10 à 20 fois plus qu’une recherche classique sur Google. Et la création d’une seule image via le générateur d’image DALL-E nécessite l’énergie nécessaire pour recharger un smartphone de 0 à 100%.
Nous avons vu que l’IA peut aider à lutter contre le changement climatique mais que son empreinte écologique et notamment celle des modèles LLM est préoccupante.
Comment limiter l’impact global de l’IA sur l’Environnement ?
A l’occasion du Sommet sur l’IA qui a eu lieu à Paris en février 2025, une coalition pour une IA écologiquement durable a été annoncée. Elle regroupe plusieurs parties prenantes de la chaîne de valeur de l’IA comme la France, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), et l’Union internationale des Télécommunications (UIT). C’est la première fois que le volet environnemental a été réellement abordé lors d’une réunion internationale sur l’IA. L’objectif de cette coalition est d’amener l’IA vers une voie plus durable et plus écologique.
Pour Thomas Cottinet, Directeur d’Ecolab, “l’IA n’est pas la baguette magique mais elle fait partie de la solution”. Par ailleurs, la France est le premier pays à l’été 2024 à proposer un référentiel général de l’Intelligence Artificielle Frugale.
L’IA Frugale rassemble l’ensemble des pratiques et réflexes qu’il faut suivre pour diminuer au maximum son impact. C’est donc une IA qui utilise moins de ressources (matières premières, eau, électricité…) sur l’ensemble de son cycle de vie.
« Si nous adoptons ce virage de l’IA frugale, nous pourrons continuer à innover grâce à l’IA tout en accomplissant les efforts nécessaires pour atteindre nos objectifs environnementaux et, ce faisant, créer une filière responsable offrant un avantage compétitif. »
Faire des choix responsables en matière d’IA implique de privilégier des modèles plus petits et spécifiques, équilibrant performance et consommation. Les IA traditionnelles, axées sur des tâches prédictives et analytiques, restent utiles et moins énergivores que les IA génératives. Utiliser des GPU moins gourmands en énergie, comme ceux d’Ampere Computing, et favoriser des sources d’énergie décarbonées pour les data centers est essentiel.
Le secteur du luxe, de par ses exigences de qualité et de durabilité, semble être le terrain idéal pour expérimenter des IA plus sobres afin de limiter l’impact sur la planète. Grâce à l’IA, les marques de luxe peuvent optimiser leurs chaînes d’approvisionnement, réduire leur empreinte carbone, ou encore concevoir des produits plus écologiques tout en maintenant des standards élevés.
Par ailleurs, chaque petit geste compte et nous allons voir comment chacun d’entre nous peut limiter l’impact de l’utilisation de l’IA sur notre Planète et qu’il est possible de concilier innovation et respect de l’Environnement. Voici quelques bonnes pratiques à retenir :
- Être frugale dans son utilisation de l’IA : Il n’est pas nécessaire d’utiliser une IA générative pour faire un calcul ou une liste de courses ! Interroger un moteur de recherche classique pour connaître une date, trouver un synonyme ou encore une définition.
- Optimiser les prompts : Au lieu d’enchaîner plusieurs phrases, construisez un prompt clair et précis qui évitera trop de questions réponses.
- Supprimer vos données archivées et inutilisées : Prenez l’habitude de supprimer les échanges inutiles. Cela permet d’alléger les data centers et de réduire leur empreinte carbone.
- Prioriser les modèles spécialisés et plus petits : Utiliser le dernier modèle GPT-4 n’est souvent pas nécessaire. Pour réviser un texte et sa grammaire par exemple, optez pour des versions antérieures comme GPT-3 ou Grammarly. Par ailleurs, il vaut mieux prioriser l’utilisation d’IA Assistant (ChatGPT, Mistral IA) qui sont plus éco-conçues et qui donnent la réponse aux questions plutôt que des IA Search (Copilot, Gemini) qui sont souvent liées aux moteurs de recherche et qui disent où trouver la réponse.
- Prioriser les modèles open-source : Les modèles open-source permettent de faire tourner une IA sur sa propre infrastructure sans mobiliser de serveurs lointains. Ainsi, le représentant de Mistral a distingué les vertus de l’open source, qui permet de ne pas multiplier les modèles d’IA et de limiter l’impact climatique lié à l’entraînement des IA.
Une étude de Green IT et Publicis avance le fait qu’au bout de 5 prompts envoyés, l’EcoIndex de Mistral IA maintient son score à 45/100 quand celui de ChatGPT passe à 38. Ainsi, si les 5% de Français qui utilisent très souvent l’IA préféraient Mistral, l’équivalent de 141 440 kg d’émissions de CO2 seraient évitées et 2 121 600 litres d’eau seraient économisés.
En conclusion
L’IA et notamment l’IA générative, grâce à ses algorithmes puissants et ses applications innovantes, est devenue essentielle pour de nombreux individus et organisations. Cependant, son empreinte écologique, souvent sous-estimée, présente des défis importants pour la transition énergétique. Pour rendre l’IA plus durable, il est crucial d’optimiser les infrastructures, de promouvoir la sobriété énergétique des algorithmes et de lancer des initiatives visant à rendre les data centers plus écologiques.
En nous focalisant sur une IA Frugale, c’est à dire en adoptant des pratiques écoresponsables dans la conception, l’exploitation et l’utilisation de l’IA, nous pouvons tous tirer parti de ses avantages technologiques tout en réduisant ses impacts négatifs sur l’environnement.
Chez Adone, nous adoptons une posture de conseil pragmatique, en mettant l’accent sur des principes fondamentaux : esprit critique, responsabilité, sécurité et transparence. Nous considérons l’IA comme un outil puissant, mais qui doit être manipulé et intégré avec discernement pour servir des objectifs clairs et apporter une véritable valeur ajoutée.
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